Darky pilotait tant bien que mal la tête de Mickey shootée à l’hélium. Il agitait un éventail en tous sens pour manœuvrer l’énorme engin. Depuis qu’il avait entendu l’explosion, son but était de s’approcher suffisamment près du premier étage pour que Hugo saute dans la nacelle. Vu la maniabilité de l’engin, Darky se disait qu’il serait bien content s’il parvenait simplement à sauver ses miches. Depuis la nacelle, il voyait Dohly et les lego s’agiter comme des mouches, mais aucune trace de la capsule. Il parvint enfin à s’approcher du premier étage. Il restait encore plusieurs centimètres entre la nacelle et le rebord. Hugo ne parviendrait jamais à sauter une telle distance. D’autant qu’il ne semblait pas comprendre les gestes que Darky lui faisait pour l’inciter à sauter. Le lego noir ne vit pas tout de suite Dohly se mettre à courir avec Bank accroché à ses jupons. Quand il s’en aperçut, elle fonçait déjà vers le ballon comme un rhinocéros. Bank et elle atterrirent avec fracas dans la nacelle. L’indirigeable partit sur le coté, effectua une dangereuse embardée qui manqua de les faire tous chavirer. Une fois le ballon et les esprits rétablis, Darky prit la parole. Sachant que sa face leur était inconnue, il joua sa partition favorite :
- « Toujours par deux ils vont, le maître et son apprenti ».
Interloqués, les deux passagers clandestins restèrent muet jusqu’à que Darky les dépose loin de l’agitation de l’arbre, ce qu’il ne manqua pas de ponctuer d’un solennel :
- « Et c’est ainsi que meurt la liberté, sous une pluie d’applaudissements ».
Sur les indications de Darky, Nuparu et Hahlil avaient suivis de loin le rabatteur et Hugo, sa pseudo victime. Aux abords de l’arbre habitation, ils avaient mis au point un plan d’attaque à la stratégie subtile et qui pouvait se résumer en quelques mots : « On s’en fout, on explose tout ». Leur entrée dans la planque avait scrupuleusement respecté ce plan, et une fois la fumée de l’ascenseur dissipée, les deux flics avaient pu voir une flopée de lego ainsi qu’une opulente personne aux cheveux en pate à modeler s’agiter dans tous les sens. Nuparu lança comme à son habitude la première partie de l’injonction, suivi de près par Hahlil :
- Deus ex …
- Machina !
Sans effet sur les lego qui s’échappaient comme des rats, les deux mechs déclarèrent ouverte la chasse aux fugitifs. Ce que les flics n’avaient pas prévu, c’était les parois qui barraient la route tous les trois pas et favorisaient le déplacement de ces nains de lego. Chaque passage était une épreuve pour eux. Hahlil venait de passer une porte quand un éclat de lumière l’aveugla, le reflet provenait d’un ballon à l’hélium aux couleurs métalliques, un ballon étonnamment proche se dit-il. Hahlil ne vit pas le lego acculé à quelques pas de lui. Un lego dont il n’aurait fait qu’une bouchée en temps normal. Pourtant, ce jour là, le reflet l’empêcha de voir celui qui allait le descendre. Jojo, armé d’un briquet tempête appuya sur le bouton et au click succéda le sifflement incandescent d’une flamme bleue. Hahlil se tordit de douleur. Nuparu, bloqué derrière la cloison par le corps en fusion de son frère d’arme, resta impuissant en entendant son dernier cri.
